Les élu-e-s écologistes de Toulouse s’interrogent sur la mise en place dans notre ville de caméras de vidéosurveillance dotées d’intelligence artificielle, annoncée par l’adjoint en charge de la sécurité.
Il s’agirait d’installer dès 2017 une centaine de caméras équipées d’un système capable d’identifier les comportements suspects et d’interpréter une éventuelle menace afin de déclencher une alerte police. D’un usage principalement destiné à la dissuasion et à l’élucidation, ce dispositif induirait un basculement de la vidéosurveillance vers un usage de type « prédictif », ouvrant la possibilité d’une intervention policière avant même qu’un acte illégal ait été commis.
La « police prédictive » suscite de nombreux débats sur le plan international, tant sur son efficacité qu’en matière de respect des libertés et droits fondamentaux. Nous sommes donc surpris que la municipalité s’apprête à en importer des ingrédients à Toulouse, sans concertation préalable, et en s’affranchissant visiblement de tout contrôle citoyen.
Pas de concertation sur l’efficacité des dispositifs au regard de leur coût. Pourtant un comportement suspect n’aboutit pas toujours à un acte illégal, et un acte illégal ne débute pas toujours par un comportement suspect. Par ailleurs des expérimentations déjà conduites ont montré que la vidéosurveillance intelligente entraîne un risque élevé de « faux positifs », c’est-à-dire d’interprétations erronées des comportements. Car les algorithmes de détection sont souvent perturbés par les nombreux stimuli qu’ils sont susceptibles de recevoir. Une étude publiée par l’Université britannique Queen Mary affirme que ces technologies « souffrent d’un fort taux de faux positifs, d’une sur-sensibilité aux changements dans le contexte visuel en raison de règles très strictes et d’une mauvaise adaptation aux environnements accueillant des foules ».
Pas de prise en compte de l’enjeu de respect des droits fondamentaux. Pourtant ces technologies peuvent mettre à mal le principe constitutionnel de la présomption d’innocence, également contenu dans l’article 9-1 du Code Civil. L’ONG britannique Big Brother Watch a d’ailleurs émis des craintes, considérant l’idée « que l’on peut stopper un crime avant qu’il ne soit commis » comme « inquiétante ».
Ces éléments auraient à eux seuls justifié davantage de précautions. Mais pour Antoine Maurice, président du groupe des élus écologistes et membre de la commission des libertés et de la tranquillité publiques : « la majorité de Jean-Luc Moudenc cède une fois encore à une forme de surenchère sécuritaire. Et la commission des libertés publiques, créée en 2014 et supposée émettre des avis concertés sur le déploiement de la vidéosurveillance, apparaît de plus en plus comme une supercherie. Elle ne sert plus que de caution au choix fait par la majorité d’une généralisation aveugle de la vidéosurveillance, en contradiction flagrante avec la Charte européenne pour une utilisation démocratique de la vidéosurveillance dont la Ville reste signataire ! »
. Nous attendons donc de la majorité des précisions sur l’usage qui sera fait du dispositif et rappelons la nécessité d’un contrôle citoyen des technologies de surveillance publique, aussi « intelligentes » soient-elles…